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Thanaa Hussein, une Palestinienne Rescapee des Camps de la Mort du Regime Syrien: Temoignage Video

By Firas Kontar

Thanaa al Hussein, une Palestinienne rescapée des camps de la mort du régime syrien. Elle a témoigné du viol et de la torture qu’elle a subis durant six mois et, si elle prend la parole à visage découvert, c’est pour tous les autres détenus des prisons d’Assad. Son courage exceptionnel mérite notre mobilisation, alors partageons ses paroles, faites-le savoir.

« Je m’appelle Thanaa al Hussein, originaire du camp de Yarmouk en Syrie. Nous avons vécu le siège du camp durant sept mois, sept mois de peur, de soif, de faim… A l’époque j’étais mariée, des rumeurs disaient que nous serions déplacés vers le nord du pays, mon mari refusait de partir, il disait qu’il y aurait un accord (avec le régime Assad) pour ceux qui souhaitaient rester. Mes frères ont été déportés vers le nord, ils sont partis car l’un d’eux avait passé un accord avec le régime et a pourtant été arrêté. Il est toujours en prison depuis 2014. Nous sommes donc restés avec mon mari. Un mois après l’accord de réconciliation, le régime a mené une campagne d’arrestations et mon mari a été arrêté. Avec ses parents, nous nous sommes lancés à sa recherche dans différentes prisons, mais personne ne donnait la moindre information. Puis nous avons appris sa mort en prison via les services d’état civil. Je me suis retrouvée seule avec mon enfant et j’ai commencé à travailler pour vivre.

(Témoignage Vidéo en Arabe)



Un jour, deux agents de la sécurité d’état sont venus à mon domicile, ils m’ont menottée et embarquée dans une leur caserne. Ils m’ont interrogée en m’accusant d’avoir aidé des milices armées, puis m’ont transférée à la caserne Palestine, parce que je suis palestinienne. Pendant mon transfert, mains menottées dans le dos et cagoulée, je pleurais  et je les implorais de me laisser retrouver mon enfant  resté seul, leur jurant de n’avoirjamais rien fait.

  



Ils me rouaient de coup en déblatérant des obscénités et en m’accusant de terrorisme. Je n’avais que deux choses en vue, mon fils et ma mère. Mon petit, à l’époque, avait un an, c’était ses premiers mots, il  disait mamensais que j’allais mourir, c’est ainsi quand on se fait arrêter à Damas, on se fait violer, on meurt… De toute façon, j’étais socialement morte, je serais une pestiférée à ma sortie de prison.

Ils m’ont déposée dans une cellule sombre, j’avais très très peur. Un homme de grande taille avec l’accent alaouite (accent de la région côtière) est entré et s’est mis à accuser tous les Palestiniens d’être des chiens, des traîtres, et d’avoir provoqué la révolution. Il a commencé à me lancer des obscénités tout en m’attouchant. Je ne supportais pas cela, je l’implorais et je lui jurais que j’étais innocente, « mais pourquoi vous me faites subir ça ? ». Ce jour-là, il ne m’a pas violée, il est sorti de la cellule, des gardiens sont rentrés et ont déversé de l’eau sur moi, ils m’ont jeté un bout de pain avec quelques olives. Je ne voulais pas manger, les gardiens m’ont menacée : « si tu ne manges pas il se passera des choses pas très bien ». J’ai mangé en pleurant.

Dans la nuit, le grand gardien est revenu. Il me touchait les parties intimes. Je ne pourrais pas répéter les obscénités qui sortaient de sa bouche, tellement elles sont ignobles et imprononçables… (Un grand soupir et silence.) Il m’a violée à ce moment et a recommencé le lendemain, puis le jour suivant, puis le suivant… Ma détention à la caserne Palestine a duré environ un mois, puis ils m’ont transférée dans un endroit que je ne connaissais pas. J’avais perdu la foi, j’avais perdu tout espoir… J’espérais la mort chaque seconde, vu ce que je subissais.

Je me suis retrouvée à nouveau dans une cellule sombre, seule avec des geôliers qui me frappaient et m’accusaient de terrorisme, ça a duré quatre à cinq jours avant que je sois transférée dans une cellule avec d’autres filles. C’était la prison de Saidnaya, nous étions 35 femmes dans cette cellule. Ils nous était interdit de parler entre nous mais, en chuchotant, j’ai appris la présence de Maryam el Elou avec sa mère, toutes deux habitantes de Yarmouk.

Il y a le jour noir dans la prison de Saidnaya, c’est le jour des douches, nous devions nous laver en quelques minutes, nous n’avions plus la notion du temps. Pendant la toilette, des geôliers nous frappaient par derrière, ils nous tiraient les cheveux  et nous touchaient les parties intimes. De retour à la cellule, toutes les femmes étaient en pleurs. Il m’est très difficile de parler tellement c’est dur mais il faut que je le fasse, j’ai eu la chance de sortir de cet enfer, le monde doit savoir, tous les pays doivent savoir, j’en appelle au monde pour qu’il agisse. Nous subissons la torture quotidienne, les détenus meurent mille fois par jour dans cet endroit. A Saidnaya, il y avait bien sûr des viols, les geôliers rentraient dans la cellule, choisissaient une détenues selon son physique etl’embarquaient.

Je suis restée cinq mois à Saidnaya. Un jour, un geôlier m’a appelée. J’ai tout de suite pensé à l’exécution ou au viol, c’était les seules raisons pour lesquelles on était appelée. Un des officiers m’a expliqué que j’avais été détenue par erreur et qu’après vérification j’allais être relâchée. Il m’a conseillé de ne jamais parler de ce que j’avais subi et vu, « sinon ta prochaine détention risque d’être très différente de celle-ci ». J’étais heureuse et triste, j’avais peur de la réaction de mes proches et de la société… Je suis sortie  très fatiguée psychologiquement. Il faut que le monde se bouge pour les détenus, j’ai vécu six mois de souffrances indescriptibles, imaginez la souffrance de ceux détenus depuis deux, quatre ou six ans. Il y en a qui sont morts, d’autres ont survécu, d’autres ont perdu la tête.

Mes frères m’ont aidée à sortir de ma détresse, surtout l’un d’eux, en Allemagne. Mes voisins aussi ont été très présents. Quatre de leurs enfants sont en prison : ils ont eu beaucoup de compassion pour moi. »

Thanaa a quitté les zones tenues par le régime Assad. Elle travaille dans l’ONG la Femme et l’Enfant, qui l’a aidée à se reconstruire. Elle milite pour que les anciennes détenues prennent la parole et se libèrent de la honte.

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