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'La belle et la meute' Un film d’un réalisme étouffant


TUNIS (Zaman Al Wasl)- « La belle et la meute» est le deuxième long métrage fiction de Kaouther Ben Hania, inspiré de l’autobiographie « Coupable d’avoir été violée » de « Meriem », victime de viol commis par des policiers. C’est aussi la deuxième fiction, après « Challat de Tunis » inspirée de faits réels qui ont causé une polémique en Tunisie.

En allant voir le film, je pensais que j’allais voir une histoire dont je connais les détails puisque je l’ai suivi de près en tant que journaliste et militante des droits de l’homme. Donc, mis à part le coté cinématographique du film, l’histoire allait être du « déjà vu ».

Je ne m’attendais pas à ce que j’allais être affectée de la sorte. Je ne m’attendais pas à subir des sentiments aussi forts à en tomber malade : il n’y a pas pire que de se sentir victime solitaire contre une meute !

A travers l’écriture et la direction d’acteurs en plus du jeu de l’actrice principale Mariam Ferjani qui était d’un naturel foudroyant, nul spectateur ne peut regarder le film en se détachant et en faisant une distanciation, nul ne peut éviter l’empathie avec l’héroïne et partager avec cette dernière  chaque instant et chaque émotion. 


 9 plans séquences, une évolution


La réalisatrice a opté pour les plans séquences. Pas facile mais très ingénieux. 

La première séquence nous présente une jeune étudiante typique qui fait la fête avec ses amis et qui fait la connaissance d’un bel homme et accepte d’allez flirter avec lui ailleurs. Le personnage de « Meriem » était simple, innocent voire naïf et joyeux… Elle était une rose qui éclore. La séquence se termine par « Meriem » qui court affolée et terrorisée dans la rue, le jeune court derrière elle et des policiers en civil dans leur voiture  les cherchent. On conclue qu’elle a été violée par des policiers.

Les sept plans séquences, qui suivent, se déroulent entre la clinique privée,  le commissariat et  l’hôpital. Des huis clos qui nous enferment avec Meriem et son jeune cavalier dans une tornade d’injustice, de résistance, de peur, de menaces, de torture morale et psychologique, de pleurs, de cris, de violence physique… tout cela nous lance dans  l’univers d’un thriller bien fait.

Ce qui est intéressant, c’est qu’à chaque nouveau plan séquence, on remarque l’évolution de Meriem : la jeune naïve, la traumatisée hystérique, la victime, la victime qui culpabilise, la révoltée, la  résistante, la sobre qui sait ce qu’il faut faire et qui renverse la vapeur, la femme qui ne cède pas.

La nuit semblait ne pas avoir de fin

Plusieurs critiques et cinéphiles, y compris moi, avons remarqué l’atmosphère kafkaïenne qui régnait tout au long du film. Je peux même me permettre d’indiquer que « Le Procès » et « Métamorphose » (deux romans de Kafka) étaient présents ; le procès d’une société porteuse de jugement et accusatrice des femmes victimes de viol et la métamorphose de l’héroïne.

La nuit semblait ne pas avoir de fin. Sauf que la fin du film nous libère de cette atmosphère puisque Meriem s’est libérée de tout le fardeau qui lui pesait sur le dos : elle s’est libérée de la peur de sa famille, de la société, de l’autorité policière mais surtout du fait de se sentir victime et coupable. 

A l’aube et avec les premières lueurs d’un nouveau jour, Meriem quitte le commissariat victorieuse  et surtout nouvelle et autre. Cette aube, cette lumière et cette victoire annoncent non seulement une fin heureuse mais l’espoir. Un espoir dont nous  avons plus que besoin.

« Le noir de ce film n’est là que pour faire luire cette belle lumière qui met fin à la nuit » (par Michel Onfray)
Connaissant Kaouther Ben Hania depuis l’an 2000, l’espoir ne lui est pas étranger.  Elle croit aux fins heureuses et sait pertinemment que toute nuit, peu importe sa longueur, sera achevée  par une aube. Et je peux me permettre de lire en deuxième degré, que le personnage de Meriem n’est que la Tunisie. Notre pays qui vit depuis un moment une période assez difficile et que plusieurs, surtout les jeunes, pensent qu’il est pris en otage voire violé.

A travers Meriem et les policiers, Kaouther nous décrit ce que le système fait de notre pays mais tout au long des événements, il y avait toujours quelqu’un  ou quelqu’une qui est là, la soutient, la redresse, l’aide : le jeune homme qui l’encourage à ne pas céder à ses droits, l’infirmière à l’hôpital qui l’a orienté vers un médecin, le bon policier qui lui dit que la loi est de son coté et qu’il faut que justice soit faite… bref, il y’aura toujours des gens honnêtes qui ne laisseront jamais tomber les Meriems ni la Tunisie. (Par Sondes Zarrouki, rédaction par Mohamed Hamdan)


  

Zaman Al Wasl
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